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Plan de déplacement urbain

Le texte de cette loi(En fait, la plupart de ses articles ont été déplacés en 2000 dans le nouveau code de l'environnement (articles L220-1 et suivants).) (disponible sur legifrance ) est très favorable aux modes de transport non polluants comme la bicyclette. Le PDU qui en découle devrait l'être aussi.

Est-ce le cas du projet de PDU de notre ville ?

Objectif de la loi

Dans son premier article la loi affirme sans ambiguité son objectif, qui est :

-Art. 1er. [...] la mise en oeuvre du droit à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé. Cela consiste [...] à réduire ou supprimer les pollutions atmosphériques.

Elle précise ensuite ce qu'elle entend par "pollution atmosphérique".

-Art. 2. Constitue une pollution atmosphérique, l'introduction par l'homme dans l'atmosphère de substances préjudiciables [...] à la santé et aux écosystèmes, ou [...] de nature à influer sur les changements climatiques.

Ces deux premiers articles posent donc sans ambiguité les objectifs

de la loi et éclairent par conséquent la lecture de la suite du texte.

Par exemple, lorsqu'un article annoncera qu'il faut prévoir «l'aménagement [...] de la voirie afin de rendre plus efficace son usage, notamment en l'affectant aux différents modes de transport».

Hors du contexte de la loi cette phrase peut laisser penser que "rendre efficace l'usage de la voirie" signifie écouler la plus grande quantité de véhicule à la plus grande vitesse possible. Mais à l'éclairage de ces premiers articles, l'efficacité doit précisément être de limiter les déplacements polluants, et de favoriser ceux qui produisent pas ou peu de pollution atmosphèrique en leur affectant plus d'espace.

PDU

Passons sur les premiers titres de la loi qui énonce les mesures à prendre pour "Surveiller, la qualité de l'air, definir des seuils d'alerte". Ils définissent les plans régionaux d'observation, les mesures à prendre lorsque les seuils d'alerte sont dépassés. Nous allons sauter directement au cinquième titre, qui définit les PLANS DE DEPLACEMENTS URBAINS(Les articles de la loi Lepage relatifs aux PDU ont dès l'origine été intégrés dans une loi plus ancienne: la loi de 1982 dite d'orientation pour les transports intérieurs (la LOTI). Plusieurs fois modifiés depuis 1996, ce sont donc les articles 28 et suivants de la LOTI).

-Art. 28. Le plan de déplacements urbains définit les principes des

transports urbains. Il a comme objectif un usage coordonné de tous les modes de déplacements, notamment par une affectation appropriée de la voirie, ainsi que la promotion des modes les moins polluants et les moins consommateurs d'énergie. Dans un délai de deux ans à compter de [...] 1996, l'élaboration d'un plan de déplacements urbains est obligatoire, dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants.


On peut donc s'étonner que ce document soit encore à l'étude à Perpignan alors qu'il devrait être actif depuis 1998. Mais surtout, ces années de retard sont aussi des années qui n'ont pas suivi les orientations de cette loi, pendant lesquelles on a continué de créer de nouvelles voies

pour la voiture individuelle, augmenté l'offre de stationnement en ville, et rendu de plus en plus difficile la pratique du vélo et de la marche, ou l'efficacité des transports en commun. Les cyclistes et les piétons peuvent témoigner que ces modes de déplacement là sont loin d'être encouragés ni favorisés dans la CAPM et en ville.

PDU et trafic auto

Voyons maintenant ce que le PDU doit contenir.

-Art. 28-1. Les orientations du plan de déplacements urbains portent sur :

-** 1° La diminution du trafic automobile.

Certaines villes se sont autorisé une interprétation relative de cette « Diminution du trafic automobile ». Quand on se donne la peine de le quantifier, il est en effet facile d'exprimer le trafic automobile en pourcentage de partage modal (pourcentage des citadins prenant la voiture, les transports publics, le vélo, etc). A Perpignan, si ce pourcentage restait constant, ou même diminuait un peu, le trafic automobile augmenterait tout de même. En effet, dans la Communauté

d'Agglomération Perpignan-Méditerranée, on prévoit dans les prochaines années une augmentation simultanée

-de la population de notre ville,

-de la mobilité (nombre de déplacements par jour et par personne),

-et des distances parcourues, de plus en plus longues avec l'étalement de la ville.

Une réduction de quelques pourcents de cette "part modale"

se traduira donc de toute façon par un formidable accroissement des flux automobiles.

Ainsi, dans son projet de PDU, la CAPM, fait ce calcul. Si la population augmente comme on le prévoit(étude du CETE Méditerannée), en 2020, le nombre de déplacements sur l'agglomération aura augmenté de 30%, tous modes confondus.

Par conséquent une hausse parallèle du nombre de déplacements en voiture

de "seulement" 24%, correspondrait à une baisse de la part modale

pour la voiture de 3%. Peut-on considérer qu'il s'agit d'une baisse

du trafic automobile ? Peut-on alors considérer qu'on respecte les

objectifs de la loi qui était de "réduire ou supprimer les pollutions

atmosphériques" ? C'est pourtant le PDU qui se prépare et qui devrait bientôt être soumis à l'enquête publique....

Quelques agglomérations se sont fixés des intentions plus proches de l'esprit de la loi en exprimant la baisse du trafic automobile en nombre de véhicules ou en nombre de kilomètres parcourus(in Jean-Marc Offner (Laboratoire Techniques-Territoires-Sociétés LATTS-ENPC)). C'est le cas

-en Ile-de-France,

-à Saint-Etienne,

-à Lille,

-à Toulon...

Perpignan ne pourrait-elle décider de suivre en cela les bons élèves de la protection de l'environnement ?

PDU et TC

La suite de l'Art. 28-1, prévoit ensuite que les orientations du PDU portent sur :

-**2° Le développement des transports collectifs et des moyens de déplacement

économes et les moins polluants, notamment l'usage de la bicyclette et la marche à pied.

A Perpignan, les Transports en Commun jouissent de trop peu de voies en site propre pour être efficaces. Au moment où ils sont le plus utilisés, où les gens ont besoin de la plus grande fréquence, c'est l'heure de pointe, c'est l'heure de bouchons pour tout le monde, pour les bus comme pour les voitures, et c'est donc l'heure de moindre efficacité pour les TC.

Résultat : ils sont boudés par nos concitoyens qui sont moins de 6% à les utiliser(voir le diagnostic sur le site de la CAPM).

Si je suis dans ma voiture, coincé dans un bouchon sur les deux voies du pont Arago, j'écoute tranquillement sur France-inter les conditions de circulation sur le périphérique parisien, en me disant que c'est pire la-bas, et j'observe les gens serrés dans leur autobus coincé également dans le bouchon. Ils ne vont pas plus vite, ils n'ont pas la radio, et certains sont même obligés de rester debout ! Suis-je incité à prendre le bus demain ?

Si en revanche, je suis dans ma voiture, coincé dans un bouchon sur une voie du pont Arago, et que j'observe les bus filer vers le centre sur une autre voie, réservée aux bus et aux vélos, demain, je fais quoi ?

On ne peut pas favoriser en même temps la voiture particulière ET les autres modes de transports. Il faut choisir l'un ou l'autre. Cette Loi impose que ce choix soit fait en faveur des modes les moins polluants (marche, vélo, et TC).

PDU, partage et stationnement

Cet article Art. 28-1, recommande ensuite :

-**3° L'aménagement et l'exploitation du réseau principal de voirie d'agglomération, afin de rendre plus efficace son usage, notamment en l'affectant aux différents modes de transport;

-**4° L'organisation du stationnement sur le domaine public, sur voirie et souterrain, notamment la classification des voies selon les catégories d'usagers admis à y faire stationner leur véhicule, et les conditions de

sa tarification, selon les différentes catégories de véhicules et d'utilisateurs, en privilégiant les véhicules peu polluants ;

Ces orientations, éclairées par les articles préliminaires de la Loi,

doivent clairement servir son objectif de réduction des pollutions.

Nous avons déjà parlé du partage de la voirie qui devrait favoriser les modes non polluants. Cet article évoque aussi le stationnement et les catégories d'usagers. Il s'agit évidemment de traiter différemment les résidents en ville, et les autres catégories d'usagers, c'est à dire :

-les pendulaires, qui viennent travailler en ville le matin (bouchon de 08h00) et rentrent chez eux le soir (bouchon de 17h00),

-les chalands, qui viennent faire leur courses dans les commerces du centre-ville,

-les touristes, qui suivent les panneaux "centre-ville", puis cherchent une place pour leur voiture au pied du castillet,

-les écoliers, que papa ou maman dépose en 4x4 devant le collège.

Toutes ces catégories sont aujourd'hui encouragées à utiliser la voiture particulière et à stationner en ville. Ces dernières années, Perpignan a connu une formidable hausse de l'offre de stationnement en ville. Pour « compenser la perte des 350 places du parking République », on a construit (ou prévu) dans le centre plus de 1000 places dans des nouveaux parkings.

-Sous la place de la République (300 places),

-à la place de la caserne Dagobert (300),

-sur la dalle Arago (140),

-sous la Basse (300),

-dans l'extension du parking Wilson (150).

Ces constructions sont contraires à l'objectif affiché dans le projet de PDU de "réduire l'offre de stationnement en ville". Et ce discours bien pensant cache un souci électoraliste de toujours faire plus pour les automobilistes, y compris en termes financiers. Tout ces aménagements pour le stationnement consomment énormément d'espace, si rare en ville, et coûtent cher à la collectivité. Et il ne sont pas remboursés par les horodateurs qui remboursent à peine le travail des agents qui doivent chasser les infractions à la taxe sur le stationnement, qui concerne 63% des voitures stationnées sur la voie publique !

Bien au contraire de cela, la loi prévoit ceci :

LOTI : Art. 28-1-2. - Le P.D.U. délimite les périmètres à l'intérieur desquels [il] permet de réduire ou de supprimer les [...] aires de stationnement, notamment lors de la construction d'immeubles de bureaux, ou à l'intérieur desquels les documents d'urbanisme fixent un nombre maximum d'aires de stationnement à réaliser [...]. Il précise [...] les limites imposées par les plans locaux d'urbanisme [...] en matière stationnement pour les véhicules motorisés et les minima des obligations de stationnement pour les véhicules non motorisés.

Cet article prévoit donc qu'on peut, dans le PDU et le PLU (le [?Plan Local d'urbanisme], (C'est un document d'urbanisme qui concerne la ville de Perpignan, et pas la Communauté d'Agglomération. Celui de Perpignan est en préparation et nous aimerions arriver à en faire une étude critique comme celle-ci. Les documents sont plus ou moins accessibles au service Urbanisme de la ville (couvent des minimes).)), limiter le nombre de place de stationnement voiture, et imposer un minima pour le stationnement des vélos. L'intention est claire : dissuader l'usage de la voiture, inciter à utiliser des «véhicules non motorisés». Nous n'avons hélas rien vu de tel dans notre futur PDU.

PDU et livraison

-** 5° Le transport et la livraison des marchandises de façon à en réduire les impacts sur la circulation et l'environnement.

Le transport de marchandises par camion est polluant à plusieurs point de vue, et chacun sait qu'il est urgent de réduire l'utilisation de ce mode de transport dangereux. Mais à certains points de vue, ce sujet dépasse les compétences de notre collectivité locale. En ce qui concerne les livraisons, il me semble que les seuls véhicules qui ont justement VRAIMENT besoin d'accéder au centre-ville en véhicule automobile, ce sont les livreurs qui assurent le fonctionnement des commerces du centre.

Idem pour les artisans qui assurent des services en centre-ville, et transportent avec eux outils et matériels. On imagine difficilement comment les encourager à utiliser le bus, mais on imagine facilement comment ils doivent pester contre les difficiles conditions de circulation en ville. Ne seraient-ils pas plus heureux, ne feraient-ils pas mieux leur travail si on évitait les voitures particulières, avec un seul occupant, dont une sur deux a parcouru moins de 3 kilomètres pour venir congestionner les artères de la ville, en circulant, en stationnant, ou en formant des bouchons ? Si on arrive à réduire le nombre de voitures particulières inutiles, on trouvera ensuite comment "réduire l'impact sur l'environnement de la livraison des marchandises".

Ne prenons qu'un exemple. Les seuls véhicules qui ont besoin d'emprunter la rue d'Alsace-Lorraine ne sont-ils pas ceux des livraisons et de secours ?

PDU et PDE sont sur un bateau

-**6° L'encouragement pour les entreprises et les collectivités publiques à favoriser le transport de leur personnel, notamment par l'utilisation des transports en commun et du covoiturage.

Cette loi lAURE, puis en 2000, la Loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU), encourage en effet les collectivités et les entreprises publiques ou privées à mettre en œuvre des Plans de Déplacements d'Entreprises (PDE). Il s'agit de plans de mesures pour limiter l'usage de la voiture dans les déplacements domicile-travail des salariés. L'enjeu du PDE est de modifier de façon durable les habitudes de déplacements d'une entreprise (trajets domicile - travail et déplacements professionnels). Il prend la forme d'un partenariat entreprise/collectivité.

La mairie de Perpignan, le Conseil Général, tous les autres grands employeurs en ville ont-ils déjà conçu un tel plan ? Ont-ils seulement mené une réflexion sur la façon dont se déplacent leurs personnels ? Offre-t-on aux bicyclettes la possibilité de stationner sûrement, et continue-t-on à rembourser les frais de stationnement de ceux qui viennent en voiture ? Interpellez et interrogez vos employeurs à ce sujet. Vous serez surpris de voir à quelle point leur réflexion à ce sujet date de 1960.

Voies Cyclables

On peut être surpris que le PDU de la CAPM ne soit toujours pas en vigueur. Surtout qu'il était prévu pour les retardataires que si, dans un délai de trois ans à compter de la publication de la loi de 1996, le PDU n'est pas approuvé, le préfet procède à son élaboration.

La CAPM de Perpignan n'est certes pas la seule ville de France en retard, mais peut-on espérer que tout ce temps accordé à la réflexion permettra d'accoucher d'un projet novateur, écologique et intelligent ? Le plus grave est surtout que l'esprit de la loi tarde aussi à être appliqué. Notamment avec cet article très favorable à la promotion de la bicyclette comme moyen de déplacement(Titre VI-Art.20 : Article la loi LAURE, également déplacé dans le CODE DE L'ENVIRONNEMENT).

-Titre VI-Art.20 A l'occasion des réalisations ou des rénovations des voies urbaines [...], doivent être mis au point des itinéraires cyclables pourvus

d'aménagements sous forme de pistes, marquages au sol ou couloirs indépendants.

La réflexion du législateur est claire : on ne peut pas imposer à une ville de couvrir instantanément l'agglomération d'un réseau cyclable, mais il faut imposer qu'elle ait cela comme objectif, et qu'elle profite de chaque chantier pour développer une partie de ce qui deviendra, au fur et à mesure de chaque modification, un réseau cyclable.

Une piste cyclable, ce n'est pas gratuit, mais c'est environ 20 à 50 fois moins cher qu'une rocade urbaine de 2 x 2 voies (à même capacité horaire). Avec l'argent de 5 km de rocade urbaine on couvre une grande ville d'un réseau complet d'aménagements cyclables, à commencer par les besoins les plus manifestes: aménager les abords des écoles, des campus, des équipements sportifs...

Tous les travaux de rénovation devraient donc constituer une opportunité pour réaliser des itinéraires cyclables :

-la modification de l'emplacement des bordures

-la réorganisation ou la requalification de la voirie (sens de circulation, gestion nouvelle du stationnement, aménagements de sécurité des piétons, affectations de voies aux transports en commun, programme de plantation...)

-les travaux de mise aux normes des réseaux souterrains lorsqu'ils conduisent à réaliser en partie les travaux décrits ci-dessus

- les travaux de rénovation de la totalité de la couche de roulement de la chaussée sur plusieurs centaines de mètres

Ces opérations sont tellement nombreuses que cette disposition, à elle seule, et si elle était respectée, devrait conduire à créer un réseau cyclable sur toute la ville en quelques années... C'est loin d'être le cas à Perpignan. De lourds travaux de voirie favorisant l'automobile ont été menés pendant toutes ces années sans concevoir d'itinéraires cyclables. Et lors d'un chantier, même dans l'hyper-centre, on se débrouille surtout pour ne pas géner la circulation des automobiles pendant le chantier.

Il est difficile de rappeler ces recommandations lors de chaque décision de conseil municipal ou de conseil d'agglomération concernant la voirie. La loi et la jurisprudence devrait suffire à décider la collectivité à faire quelque chose pour la promotion de la bicyclette. Car en effet, en exigeant la mise au point d'itinéraires cyclables "à l'occasion" de la rénovation de voies urbaines, l'article 20 pose une condition de légalité des décisions relatives à ces rénovations de voies. Qui dit condition dit préalable. La décision de rénover une voie ne devrait être prise que si des itinéraires cyclables ont été mis au point.

A la radio, on entend aujourd'hui des messages pour conseiller aux collectivités et aux entreprises d'appliquer la loi Handicap. On se souvient des procès qui ont dû contraindre les villes à respecter la loi sur les 20% de logements sociaux. Perpignan peut-elle à son tour s'opposer à l'application de la loi sur l'Air ? Faudra-t-il des procès au tribunal administratif ou des publicités à la radio pour qu'elle se résigne à favoriser les déplacements non polluants, à concevoir des itinéraires cyclables, à faire définitivement baisser le trafic automobile ?

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sources :

-fubicy :

-légifrance :

-CAPM :